La route Irish, c’est celle qui, à Bagdad, relie l’aéroport international à la zone verte. Elle est réputée être la route la plus dangereuse du monde et c’est sur celle ci que Frankie trouve la mort. Fergus, son ami d’enfance qui l’avait persuadé de quitter les parachutistes pour rejoindre les milices privées, ne croit pas à la thèse officielle et va, depuis Liverpool mener sa propre enquête.
- © Joss Barratt
C’est cette privatisation du conflit par le biais de compagnies de sécurité, assurant l’impunité à leurs agents, le plus souvent des soldats alléchés par l’appât du gain ("12.000 livres mensuelles net d’impôt" promet Fergus à son ami) que dénonce Ken Loach. Pendant que les dirigeants de sociétés engrangeaient des fortunes, leurs mercenaires risquaient leur vies. Si la douleur des victimes de massacre reste hors champs (téléphone), les carnages qui apparaissent sous forme de brefs mais intenses flash-back laissent des traces profondes dans la tête des mercenaires. Violent, brisé, Fergus, magnifiquement interprété par Mark Womack, ira jusqu’au bout de sa quête. Ken Loach évite le pathos et, en filmant au plus près des corps, nous permet d’être en complète empathie avec le héros, même lorsqu’il emploie des méthodes plus que douteuses.
En s’intéressant à cette guerre, où les cadavres des soldats sont ramenés en catimini dans des cercueils qui "ressemblent à d’énormes cageots" et où les survivants souffrent de syndrome de stress post traumatique, Ken Loach nous livre un film efficace et profondément humain.
Francis Dubois